Thomas ALIZIER, interview
Celui qui sera au VICTORY samedi à Levallois a accepté de se livrer dans notre interview. Thomas ALIZIER, 24 ans, 91kg, boxeur au BMT 91 est en plus l'auteur d'une année 2014 remarquable. Il méritait bien un vrai coup de projecteur.
MUAYTHAITV : Thomas, cette année 2014 marque un vrai tournant dans ta carrière. Comment l'expliques-tu ?
Thomas ALIZIER : Oui c'est la plus belle année de ma carrière. Ça correspond en fait à la fin de mes études l'année dernière. J'ai ensuite travaillé dans un cabinet d'architecte mais je n'ai pas prolongé. Là, je vais ouvrir ma boite de diagnostic en immobilier, ce qui me permettra d'adapter mon emploi du temps comme je le souhaite. Avant je faisais tout en même temps. Là, j'ai pu m'entrainer sérieusement et ça a payé.
Ça a commencé par un titre de champion du monde WMF en Thaïlande (voir l'article).
C'était mon premier titre en pro. Ça n'avait pas eu lieu à Bangkok mais à Pattaya à cause des évènements à l'époque. La WMF m'avait plutôt bien réussi jusque là puisque j'avais fait, en amateur, champion du monde en 2010, finaliste en 2013 et champion d'Europe en 2011.
C'était l'occasion avec cette ceinture de faire décoller ma carrière. J'ai affronté un Ukrainien et je l'ai mis KO avec un coup de genou sauté. Ça a fait le buzz, ça a bien fait parler de moi.
Il y a eu ensuite un titre européen ISKA en mai, en Italie (voir l'article).
Je remplaçais Massinissa HAMAILI. Je suis vraiment allé le chercher ce titre ! C'était contre un Slovène de la Team de Georgio PETROSYAN donc il était un peu chez lui. Je me suis fait compter, ça a été dur. Le mec était super préparé, il était sur la fin de sa carrière donc il voulait vraiment cette ceinture pour partir en beauté. Moi je n'ai pas pris ce combat à la légère mais j'étais détendu. Alors que lui, je pense qu'il s'était mis la pression.
Ces combats prouvent que tu es aussi à l'aise en muay qu'en K1.
Je me suis mis au K1 seulement l'année dernière. A la base, je suis vraiment muay mais il y a beaucoup plus de propositions en K1. Pour réussir il n'y a pas le choix. Je continuerai du coup à faire les deux. Mais c'est vrai que je me sens plus à l'aise en muay. J'ai beaucoup de victoires avant la limite avec les coudes ! Mais depuis que je me suis mis au K1, ce qui a changé c'est que je me suis mis dans le crâne de combattre au GLORY. Je n'ai que ça en tête, je ne pense qu'à ça. Gokhan SAKI, Tyrone SPONG,... Ça fait rêver ! Donc je dois à tout prix me faire remarquer, je me suis interdit de perdre.
Pour revenir à la WMF, c'est une longue histoire d'amour avec de cette fédération. Comment ça a commencé ?
Pascal MATHIEU, le directeur technique de la WMF, était l'entraineur de mon coach, Maxime JACQUEMET. Il m'a sélectionné la première fois quand j'avais 19 ans pour les championnats du monde 2010 à Bangkok. L'histoire est atypique. J'étais en junior (moins de 20 ans) et comme il n'y avait personne dans ma catégorie (-86kg) je ne pouvais pas boxer. En senior, ils étaient 7 et pas 8 donc le champion en titre, un Ukrainien, se retrouvait sans adversaire en 1/4 de finale. Il était sûr de lui alors ils ont alors accepté de me prendre sur dérogation. Et j'ai gagné ! Je l'ai complètement déboussolé grâce au corps à corps. J'ai ensuite gagné ma demi-finale, puis la finale en battant le Polonais par KO avec un coup de coude retourné. Ce combat est passé en dernier, alors que ça ne devait pas être le cas, donc ça a pu passer à la télé. J'étais devenu comme un peu la mascotte du championnat.
C'est cette compétition qui a été le déclic, la première étape de cette vocation qu'est le muay pour toi ?
En fait non, c'était juste un peu avant. Là aussi l'histoire est atypique. C'était en 2009, il y avait à Japy les qualifications pour l'équipe de France IFMA. J'avais 18 ans et j'étais en -81kg. Je n'y participais pas mais le matin même, mon téléphone sonne, c'était mon coach Maxime JAQUEMET qui me dit "Il y a un forfait en -86kg, en classe B, donc un des deux boxeurs se retrouve seul. T'es chaud ?" Comme c'était au format IFMA, caque + plastron, j'y suis allé. Je sortais du lit, je suis arrivé avec mon protège dents, à l'arrache, je n'avais même pas de short, rien ! Et j'ai vraiment maltraité mon adversaire, je lui ai mis des grosses droites ! Du coup, je me suis retrouvé dans l'équipe de France avec Sofiane BOUGOSSA pour les championnats du monde IFMA à Bangkok. J'ai fait médaille d'argent après 4 combats. Un de mes meilleurs souvenirs ! Ça avait été une aventure de fou pour tout le monde, tous ceux qui y étaient s'en souviennent : Sofiane DEREGA, Aziz RAFAI, Hamza HANDALA, Rémy VECTOL et Tarek MOUHOUB l'ambianceur !
Avec Sofiane BOUGOSSA, ton partenaire au BMT 91, vous êtes très complice.
On a toujours été super proches car on a toujours été ensemble. Il a toujours été devant moi, vu que j'étais aussi dans mes études, il a progressé plus vite donc ça me tirait vers le haut. On s'est l'un l'autre toujours tirés vers le haut.
Et humainement il est comment Sofiane ?
Il est complètement fou (rires) ! Quand tu le connais, tu comprends que c'est vraiment un baisé dans sa tête, il ne pense qu'à deconner, il fait des blagues de gamin (rires) ! Je ne sais pas vu si les gens ont vu la vidéo où on était parti s'entrainer chez Wildried MONTAGNE à Krabi et il avait dansé genre Mickael JACKSON... Du n'importe quoi ! Bref, c'est un mec super attachant.
Et votre coach, Maxime JACQUEMET ?
Il nous a eus depuis le début donc il nous connaît par coeur. Quand Maxime est dans mon coin, j'ai plus de chance de gagner que quand c'est quelqu'un d'autre. Il sait tout ce que je suis capable de faire et de ne pas faire. Oui on est vraiment proche, on s'appelle tous les jours.
En dehors de la boxe, il y a des choses qui te passionnent ?
Je fais de la peinture. Depuis que je suis tout petit. J'ai fai tune fac d'arts plastiques avant mes études d'architecture. Depuis que j'ai arrêté le travail, je m'y remets à fond. Ça me détend. Je peins avec un pote, en binôme. On fait du figuratif, il y a des trucs aussi un peu abstraits. Je faisais des expos quand j'étais petit, ça me faisait un peu d'agent de poche quand j'étais au collège. Mes tableaux valent entre 150 et 700 euros. Maintenant on fait ça souvent pour ceux qui nous demandent, la famille, les amis.
Pour revenir à la boxe, il y a des adversaires que tu aimerais affronter ?
J'aimerais une revanche contre Artem VAKHITOV. Après, contre Dzianis HANCHARONAK ça me dirait bien. Il a toujours tout gagné, il fait parti des meilleurs. Les mecs du GLORY aussi comme ILUNGA, CORBETT... En France Correntin JALLON, Pacôme ASSI et Zinédine HAMEUR LAIN.
Et combattre en poids lourds ?
Pour l'instant je reste dans la catégorie où je me sens le mieux, c'est à dire - 91 kg, - 95 kg. Je ne veux pas aller au casse pipe. Je vais continuer dans cette catégorie et on verra, pourquoi pas accepter plus lourd si ça se passe bien.
En parlant d'Artem VAKHITOV, on l'avait vu cet été au MONTE CARLO FIGHTING MASTERS et il nous avait vraiment impressionnés !
J'aimerais trop le reboxer mais je sais que je n'ai pour l'instant pas le niveau, je suis lucide. J'attends de progresser et ensuite, le reboxer au GLORY par exemple, ça serait top. Quand je l'avais affronté, c'était au World Combat Games en octobre 2013. Au 1er tour il avait battu justement Dzianis HANCHARONAK que je considérais comme le favori. Moi j'avais sorti le Danois Frederic LANGWAGEN par KO donc j'étais confiant. En demi, VAKHITOV était le favori, il était chez lui, mais moi je me sentais à l'aise, il était en plus petit que moi donc j'aimais bien. Avec le recul, j'aurais eu plus d'appréhension si je le connaissais comme maintenant. Durant le combat, j'étais vachement statique, j'ai pris des parpaings ! Il envoie des rafales de 3 coups, tu les prends plein pot, c'est fatal ! Je me suis fais compter 2 fois au 1er round sur des contres. Pendant la minute de repos, je n'ai même pas récupéré, j'ai eu l'impression que ça a duré 10 secondes ! Mon coin a vu que je n'étais pas lucide alors ils ne m'ont pas fait repartir. J'ai même eu des vertiges après. Et en final, VAKHITOV a défoncé l'Italien, un truc de fou ! Il a une super belle anglaise et une rapidité de fou ! C'est de loin le meilleur adversaire que j'ai rencontré et ça a été l'expérience la plus dure. C'est la seule fois de ma carrière où j'ai perdu avant la limite.
Samedi tu boxes au VICTORY, c'est une belle récompenses par rapport à ta superbe année ?
Je suis super content d'y être. C'est un super plateau ! Je devais boxer Moussa NYANG mais il a déconné, il a combattu au SANDA PRO FIGHT et il s'est blessé. Du coup j'affronte un Slovaque dont je ne sais pas grand chose. Je sais juste qu'il est grand...
Combatte en France en plus, c'est quelque chose qui ne t'est pas arrivé souvent ! Pourquoi ?
J'ai toujours boxé à l'étranger. J'ai combattu seulement 3 fois en pro en France. Et j'ai perdu 2 fois. Il faut dire que je n'étais vraiment pas bien préparé à cause de mes études. Je suis passé en classe A -91kg en 2011, et j'ai affronté Samy BACHAR à Japy pour les premiers tours du championnat de France Elite. J'étais ultra motivé pour ce premier combat classe A, toute ma famille et mes amis étaient là. J'ai démarré fort et envoyé chaque coup à 200%, je cherchais à le mettre KO. Je suis arrivé à l'envoyer au tapis plusieurs fois (sur middle, puis coude), mais Samy a de l'expérience et encaisse. Je me suis fatigué et il a dominé les dernières reprises. Il gagne le combat sur décision.
Ensuite je suis resté quasiment sans boxer pendant 1 an après ce combat, je n'ai pas eu le temps de m'entrainer et j'ai poursuivi mes études d'archi.
En 2013, je suis redescendu à 86kg "pour voir" si je me sentais mieux à ce poids. Ça a été très difficile pour moi, mon poids de forme était alors de 95kg, mais j'ai accepté, pour pouvoir re-boxer. J'ai affronté Arthur KOUAME à Japy, après avoir perdu près de 10 kilos. Dès le premier round je me suis senti complètement vidé, je voulais abandonner, j'étais vraiment mal. Mon coin m'a poussé à ne rien lâcher et à continuer. A la quatrième reprise, sur un enchainement gauche-coude droit, je lui ai ouvert le front, l'arbitre a stoppé le combat.
Du coup on ne m'a trop appelé pour les galas en France, peut être qu'ils ne me connaissaient pas et du du coup c'était un peu un cercle vicieux. A l'étranger, par des contacts, tu peux boxer, des managers recherchent des profils, genre un Français de tel poids. Après moi ça me plait de boxer à droite à gauche...
Le VICTORY arrive au bon moment, après cette belle année je suis comme sur un nouveau départ.
En fait je me suis déchiré il y deux mois le mollet gauche à l'entrainement en République Tchèque. Je n'ai pas couru depuis deux mois ! Alors ma prépa a été beaucoup axée sur l'anglaise. Du coup j'ai vachement progressé avec mes poings !
Qu'est ce que c'est que cette histoire d'entrainement en République Tchèque ?
J'ai boxé là-bas pour un tournoi à 8 l'année dernière, c'était mon 1er combat en K1. Et j'ai rencontré ma copine là-bas, pendant la petite soirée d'après gala. Du coup on se voit toutes les 2 ou 3 semaines et comme j'ai quelques contacts pour m'entrainer là bas, j'en profite.
Ce n'est pas trop dur une relation à distance ?
J'étais avec quelqu'un pendant 9 ans qui était trop sur moi donc là ça me convient. C'est compliqué d'aller au travail, à l'entrainement,... c'est dur d'avoir une relation quand t'es boxeur, les filles aiment forcément que tu leur consacres du temps ! C'est pas évident !
Merci Thomas et bonne chance pour ton combat samedi.