Georges-Remy SALOMON, de Nantes jusqu'au Laos
Par Julien LANCHAS le mercredi 21 décembre 2016
Le Nantais Georges-REMY SALOMON (champion de France 2016 chez les -72,5kg) a fait le choix du Laos où il s'est installé il y a cinq mois avec sa copine. Depuis, on a pu le voir au THAI FIGHT ou encore au MUAY XTREME où il a été le seul farang à s'imposer. Il n'en fallait pas moins pour attiser notre curiosité ! Voici donc l'interview de Georges-Remy SALOMON.

Georges-Remy SALOMON : Mon entraîneur avait pour projet de retourner dans son pays d'origine, le Laos, dans le but d'y monter une organisation. Il m'a proposé de le suivre afin de vivre l'aventure. J'en ai parlé à mon entourage. La conclusion était que j'avais 25 ans et que ce genre de risques il fallait les prendre maintenant car après ce serait peut-être trop tard. De plus, la France ne me permettait pas de vivre ma passion à fond, le travail, etc... Ce départ me permettait de pouvoir pratiquer la boxe à plein temps mais également de boxer sur la scène internationale. J'ai donc quitté mon travail et fait mes valises pour le Laos.
Quel est ton quotidien là bas ?
J'habite à l’extérieur du camp. Donc le schéma est un peu différent. Je me rends au camp tous les matins pour le footing du matin suivit de l'entrainement. Je passe la journée au camp pour faire les deux entraînements de la journée. Ensuite je rentre chez moi et rebelote, du lundi au vendredi. Et le week-end c'est sabai sabai quand tout va bien.
Quel est le camp où tu es ?
Je suis dans un camp à Vientiane qui s'appelle "Mouang Chanh Gym". C'est un camp qui vient juste d'être monté au Laos. Actuellement nous sommes deux "résidents" et quelques boxeurs viennent nous rendre visite de temps en temps. Ce n'est pas plus mal car on est bien suivis et notre entrainement est personnalisé.
Est-ce différent de ce qu'on peux vivre en Thaïlande ? Quels sont les différences, les similitudes ?
Sur la base de deux entraînements par jour, deux footings, c'est pareil. Mais comme je disais, le camp débute et mon entraîneur est celui qui m'a tout appris donc l'entrainement est un peu différent de ce que j'ai pu voir dans les autres camps que j'ai fait en Thaïlande (grosse base de sac et de paos). Ici c'est un peu plus diversifié et spécifique en fonction de la prépa.
Et pour les opportunités de combats ?
Je n'ai pas a me plaindre. J'ai eu l'occasion de boxer dans deux bons événements depuis que je suis arrivé.
Le premier c'était au THAI FGHT. Un sacré souvenir, non ?
Oui bien sûr, c'est ma première grosse organisation internationale donc forcément une belle opportunité pour ma carrière de boxeur. D'autant plus que c'était face à IQUEZANG qui a un beau palmarès et avec de belles performances au THAI FIGHT. Et puis il faut bien le dire, le THAI FIGHT je le regardais à la télé, en France, en me disant qu'un jour j'aurai ma place.
Et le kard chuek c'est comment alors ?
Franchement c'est bien car tu te dis que tu n'as pas le droit à l'erreur donc le niveau d'adrénaline est au max et la concentration aussi.
Le combat suivant aussi était avec des gants de MMA, au MUAY XTREME. Tu as été le seul farang vainqueur. Victoire marquante ?
Oui car la défaite contre IQUEZANG m'a laissé un goût de pas fini. Je pensais avoir fait au moins match nul. Donc celui là il fallait vraiment que je fasse la différence pour ne pas être surpris. Cette victoire il me la fallait pour regonfler mon capital confiance.
Combat de Georges-Remy à 1h04 sur la vidéo
Quels objectifs t'es-tu fixé en venant au Laos ?
En France, je n'avais vraiment pas beaucoup de propositions pour boxer, à part dans ma région. Donc mon objectif en partant au Laos était de pouvoir boxer le plus possible afin de pouvoir progresser sur le ring mais aussi de pouvoir boxer dans des organisations prestigieuses et contre des adversaires reconnus.
De quoi vis tu depuis que tu es là-bas ?
Je vis de la boxe.
Mais tu n'as pas combattu tous les mois...
Non, en effet, j'ai eu une période creuse à cause de la mort du Roi. Mais en alliant combat et économie ça l'a fait. La vie est très peu chère au Laos aussi.
Tu apprends le laotien ? Tu arrives à comprendre un peu ?
Oui j'essaie d'apprendre. Je commence à comprendre quand je suis dans le contexte. Mais je suis loin de le parler couramment.
Tu es venu avec ta copine là bas. Comment ça se passe pour elle ?
Ça roule pour elle. Elle a son petit taff et du coup son petit rythme. Elle est assistante d'éducation dans un lycée français.
Qu'est ce qui t'a amené au muaythai ? Comment tout ça a commencé ?
Avant la pratique du muay je faisais de l'athlétisme. Malheureusement je me suis blessé et j'ai donc dû arrêter pendant une assez longue période. Cette pause a entraîné une réflexion, j'avais envie de changer, Etant donné que mon père était pratiquant des arts martiaux (karaté kyokushinkai), j'ai toujours un peu baigné là dedans. Donc avec un ami on s'est dit pourquoi pas un art martial. On voulait un sport avec du contact et en même temps une philosophie. Le muay répondait nos attentes.
Tu t'es tout de suite aperçu que tu avais du talent pour ce sport ?
Je ne me suis jamais dis que j'avais du talent pour ce sport mais je me suis tout de suite dit que c'est ce que je voulais faire.
Comment définirais tu ton style en tant que boxeur ?
Je me force à ne pas adopter un style particulier. On essaie de s'adapter à chaque adversaire. Pour ça on travaille sur tous les plans dans le but de pouvoir tout faire. Du fimeu au puncheur et pourquoi pas les deux si affinité.
Ton premier combat pro était contre Hugo MAS. Quel souvenir en gardes-tu ?
On s'était déplacés à cinq. Moi, mon coach, deux soigneurs et un ami. Quand on est arrivés sur place, mon père m'avait fait la surprise en venant me voir. Super, ça faisait au moins deux supporters dans une salle de je ne sais combien de personnes ! Quand Hugo est monté sur le ring, j'ai entendu que tout le monde criait pour lui. En comparaison, quand je suis monté, j'ai entendu mon père et mon pote crier… J'ai ri tout seul. Ensuite le combat a commencé, quelques échanges de coups. Je me souviens que je n'étais pas super à l'aise. Jusqu'à ce que je sorte un coup réflexe, ce fameux crochet gauche suivi de la droite que chaque boxer a travaillé au moins une fois dans sa vie. Fin du combat au bout de 30 secondes et quelques. Et là j'ai entendu mes deux seuls supporters crier ! On en a bien ri après.
Quel est le combat qui t'a le plus marqué dans ta carrière ?
Ma défaite au MAX MUAY THAI. Car j'ai pris une grosse sanction. Ce combat était un combat de reprise pour moi. Cela faisait quasi un an que je n'avais pas boxé (dix mois exactement), je n'ai pas été sérieux dans ma préparation car j'avais deux trois problèmes à gérer à cette époque. Quand je suis monté sur le ring, aucune pression, rien du tout, j'avais perdu toutes les sensations. En résumé j'étais naze et je me suis tapé la honte...
Ca a été le seul KO pris dans ta carrière ?
Non, mon premier KO je l'ai pris en quart de finale des championnats de France 2013. Je touche mon adversaire au deuxième round il se fait compter. Je fais un abus de fairplay. Au troisième il me touche mais n'a pas été aussi gentil que moi.
Le deuxième c'était en demi des championnats 2014, contre Hamish WILLEY. La veille je n'étais pas au poids. Je fais l'erreur d'aller au sauna (erreur de débutant) pour une pesée à 18h et un combat à 20h. Autant dire que je n'ai pas eu le temps de récupérer. Je prends un high kick dans la garde mais assez puissant pour me faire tomber, je me relève mais l'arbitre arrête.
Et quel est le meilleur souvenir de ta carrière ?
Quand j'ai battu Erkan VAROL. Tout était réuni, beaucoup me voyaient perdant, beaucoup de gens s'étaient déplacées pour m'encourager, beaucoup de personnes importantes pour moi. On s'était vraiment très bien préparé. Il y a eu pas mal de communication autour de cet événement et de mon combat contre Erkan. Bref c'était l'occasion pour moi d'une, de montrer que je pouvais le faire et de deux, de me prouver que je pouvais surmonter la pression de l'enjeu. Et ça s'est fait comme ça devait se faire. J'en profite pour remercier Jawad GARNI et Badr BELHAJA pour leur confiance et ça depuis mes débuts dans le muay.
Tu as boxé au Lumpinee (l'ancien et le nouveau) ! Un rêve devenu réalité ?
Quand j'ai boxé à l'ancien, oui en effet, c'était un rêve qui arrivait peut-être un peu trop tôt. Car c'était ma première année pro et je ne me sentais pas légitime pour le faire, au vu de ce qu'on en disait. Je me souviens qu'on était arrivés limite pour mon combat. C'est la première fois que je boxais en Thaïlande. C'était aussi la première fois que je vivais le fait de faire ses bandage juste à côté de l'adversaire. De plus, je me souviens que ça m'avait surpris de ne pas pourvoir t'échauffer jusqu'au dernier moment, qu'on doive être prêt un combat avant le sien. J'avais pas mal la pression. Mais j'ai fait confiance à mon coach et ça payé. Victoire par KO.
Et la deuxième fois ?
C'était le combat juste après le MAX MUAY THAI donc j'étais vraiment focalisé sur la performance et non sur le lieu. Je voulais vraiment faire quelque chose de bien. Donc je suis passé un peu à côté du lieu. J'était vraiment concentré, mes sensations étaient vraiment bonnes pour ce combat. Victoire par KO aussi à l'arrivée.
Qui as-tu affronté comme boxeurs français dans ta carrière ?
J'ai battu Yacouba CISSE pour le titre de champion de France FFKMDA, Lukas LEMARCHAND par KO, Hamish WILLEY, Eddy BLAISE par KO, Sambou RACINE, Mickael DE OLIVERA par KO, Hugo MAS deux fois. J'ai perdu contre Sébastien BILLARD, Hamish WILLEY (pour la revanche) et Aurélien BAUP. En tout j'ai 21 combats pour 14 victoires dont 9 KO.
Tu disais que tu combattais peu en France. Tu viens de Nantes où il y a c'est vrai assez peu de Muaythai… Comment expliques-tu cela ?
Je ne pourrais pas expliquer le pourquoi du comment… Il y a c'est vrai très peu d'organisations médiatisées dans le coin donc par conséquent les boxeurs du coin ne sont pas mis en valeur. Pourtant, des boxeurs issus des alentours il y en a, comme Mourad BOURACHID avec qui j'ai eu la chance de m’entraîner, Kevin RENAHY qui était de la région avant de s'installer à Toulouse, Ludovic PROVIDENCE le champion de France 2016 poids lourds, Lois RUIZ qui a été vice champion de France. Je pense que tous ces boxeurs sont des boxeurs de talent.
Quand penses-tu rentrer en France ? Comment vois tu le retour à ta vie française ?
Pour l'instant je n'ai rien de prévu. Je m'étais fixé un an mais pour l'instant je me plais bien ici. Donc on verra pour le retour qui, je pense, sera vraiment difficile. Comme je dis souvent, ici c'est le monde de Narnia donc un retour à la vie occidentale ne peut être que difficile surtout après une longue période.
Que faisais-tu en France, tu travaillais ?
Oui je travaillais dans un bureau de design.
En dehors du muay, as-tu des passions, des choses qui occupent ta vie ?
La liste est longue. Je suis très curieux et me passionne vite pour les choses qui m’intéressent. Ça dépend des périodes et de mes humeurs. Il peut y avoir des périodes où je suis à fond dans le dessin, d'autres dans la pêche et ensuite dans mon vélo pour finir par le montage vidéo. Et ça c'est de vrais exemples, c'est pas de l'invention.
En ce moment c'est quoi ?
En ce moment c'est plus dans le graphisme.
Il y a t-il un boxeur que tu as toujours admiré ?
Je ne suis pas fan de l'admiration. Mais c'est vrai qu'il y a des boxeurs qui m'ont inspiré. Le boxeur qui m'a le plus inspiré c'est Mourad BOURACHID. Pourquoi ? Car Mourad est le premier vrai champion que j'ai connu dans la boxe thaï et en plus il s’entraînait avec nous, il habitait dans le même quartier que moi. C'était un objectif pour tous les petits de la salle.
Un prochain combat de prévu ?
Si tout se passe bien, fin janvier. Suite à ma dernière performance, on a eu plusieurs propositions. On verra ce qui est le mieux pour nous. Je ne préfère pas trop en parler car ça risque de me porter l’œil. Mais restez branchés et vous entendrez parler de moi !